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CONTEMPORAIN
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  La philosophie contemporaine  

« En philosophie analytique contemporaine, David Lewis propose une architecture très différente des mondes multiples. À la question essentielle de l’existence effective de ces mondes possibles, Lewis répond positivement de façon non ambiguë : c’est la thèse centrale du réalisme modal qu’il dessine ici. Et il ne se fonde pas sur l’astrophysique, mais sur le langage. Le monde que nous habitons, le Cosmos tout entier, n’est qu’un monde parmi une pluralité d’autres, qui sont ici spatialement et causalement décorrélés les uns des autres. Tout ce qui aurait pu se produire dans notre monde se produit réellement dans un ou plusieurs des autres mondes. Dans certains mondes, Nietzsche ne renie pas Wagner et s’enthousiasme pour Socrate, d’autres, Platon chante les louanges des harmonies complexes de la flûte ou de la cithare et invite les artistes à prendre le pouvoir dans la cité. Tout ce que nous aurions pu faire dans ce monde (mais n’avons pas fait) est effectué par l’une de nos contreparties dans un autre monde. L’histoire de cette contrepartie coïncidait jusqu’alors avec la nôtre et s’en écarte dès lors que l’un de ses éléments de réalité diffère du nôtre. Suivant le réalisme modal, l’actuel et le possible ne présentent pas de différence. »

« Il s’agit moins pour lui de convaincre (dans une certaine tradition pragmatique, il se soucie plus des effets que des fondements) que de proposer une véritable métaphysique modale. Pourquoi faudrait-il croire à la pluralité des mondes ? Lewis fonde son argumentaire sur la structure du langage ordinaire. Autrement dit, il s’attache à rechercher ce à quoi peut référer une expression comme “les façons dont les choses auraient pu se passer” pour montrer qu’il ne peut s’agir que de mondes possibles. Face aux objections de certains de ses contemporains montrant qu’en fait ces structures linguistiques renvoient beaucoup plus probablement à des concepts abstraits, Lewis a abandonné cette tentative de justification pour se concentrer sur une approche systématique et presque systémique du problème. La cohérence d’une telle démarche repose sur la construction d’une théorie totale, c’est-à-dire d’une étude de l’ensemble de ce que l’on “considère comme vrai”.

D’un point de vue technique, l’intérêt de l’hypothèse des mondes possibles tient à ce qu’il constitue un moyen de réduire la diversité des notions qui doivent être considérées comme primitives : la “vérité” dans le langage y devient plus simple à définir et à appréhender. Ce qui autorise une large économie conceptuelle et renforce l’unité globale de la théorie autant que sa robustesse. Lewis considère que ses mondes pluriels sont un paradis pour les philosophes au même titre que les classes sont un paradis pour les mathématiciens. Naturellement, Lewis, pour qui l’utilité de cette diversité est l’argument central, est conscient que celle-ci n’est pas un critère suffisant pour en asseoir la légitimité : qu’une idée soit pratique ne suffit pas à la rendre vraie. C’est pourtant sur une analyse des coûts et bénéfices du concept des mondes pluriels qu’il entend fonder l’essentiel de sa “démonstration”.

Les mondes de Lewis sont abondants. C’est une caractéristique fondamentale. Il ne doit pas y avoir de “vide” dans l’espace logique de façon que tous les possibles envisageables soient effectivement réalisés quelque part. Lewis développe un rigoureux principe de recombinaison permettant de créer des mondes. Il s’agit essentiellement par-là de s’assurer d’une profusion de mondes suffisante pour combler le réquisit de complétude du système. De nombreuses objections au réalisme modal ont été naturellement proposées. Elles sont de nature linguistique, épistémique, éthique et même intuitive. Pour chacune d’elles, Lewis offre des solutions détaillées et plausibles, mais force est de constater que la thèse centrale du réalisme modal n’a pas été largement acceptée. En proposant que réalité soit une notion indexicale, c’est-à-dire qu’elle doit être adossée aux situations locales qui la produisent, Lewis ouvre pourtant une voie singulière, extrêmement féconde pour fonder un paradigme logique et philosophique propice à la description des multivers physiques. » 

« Nelson Goodman, enfin, propose des mondes multiples en un sens très différent et peut-être plus encore. Inspiré tout à la fois par le philosophe allemand néo-kantien Ernst Cassirer et par William James, il s’intéresse à nos capacités de création de monde par l’usage de symboles. Goodman montre que nos manières de décrire le réel sont plutôt des manières de créer des mondes. Et parce que ces manières sont nombreuses et souvent incompatibles, les mondes en sont eux aussi abondants et irréductibles les uns aux autres. Le rôle de réductibilité est essentiel dans son approche : il s’agit de comprendre que les mondes de la littérature ou des arts plastiques, par exemple, ne peuvent se réduire aux mathématiques ou à la biologie moléculaire. Ils ne le peuvent ni en fait ni en droit. Nos manières de penser le réel sont si diverses - et souvent exclusives les unes des autres - que supposer l’existence sous-jacente d’un monde unique ne fait plus sens : mieux vaut considérer des mondes multiples créés par nos usages symboliques. »



 
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